Foutage de gueule ou génie ?

Bonjour,

Nous sommes le 29 août 1952 au  Maverick Concert Hall de Woodstock dans l’état de New York,

Le pianiste David Tudor entre en scène.
La salle est pleine.
Il salue le public, s’installe devant le piano à queue, puis pose sa partition.

Il ouvre le couvercle.
33 secondes passent.
Pas un son n’est sorti du piano.

Il referme le couvercle, le réouvre.
2 minutes et 40 secondes passent.
Pas un son n’est sorti du piano.

Il referme le couvercle, le réouvre.
1 minute et 20 secondes passent.
Pas un son n’est sorti du piano.

Il referme le couvercle.
Le morceau est fini.
David Tudor reprend sa partition, salue le public et quitte la scène.

C’est long, 30 secondes de silence.
C’est encore plus long, 2 minutes et 40 secondes de silence
Ça paraît immense, 1 minute et 20 secondes de silence, après les deux premiers.

Mais,
Est-ce que c’était vraiment du silence ?

Et surtout,
Qu’est-ce qu’il y avait inscrit comme notes sur cette partition ?

J’ai une copie de cette partition sur mon bureau, au moment où je vous écris.
Il y est juste inscrit :
John cage.
4’33“.
À l’intérieur, une indication, signée de John Cage :
4’33“, for any instrument or combination of instruments.

Et si ces instruments, c’était nous et le monde ?
N’y a-t-il pas eu des murmures, des respirations, des grincements de fauteuil, des rires nerveux étouffés ?
L’acoustique de la salle n’a telle pas renvoyé en écho tous ces sons ?
Le murmure de la ville n’a-t-il pas profité de cet espace pour se faire entendre ?

Ce que John Cage voulait faire ressentir, dans cette pièce, c’est que le silence n’existe pas.
Et que, paradoxalement, chaque fois que cette pièce est jouée, il est impossible d’entendre deux fois le même morceau.

Ce changement de perception, ce faux-silence, cette lenteur instaurée,
A paru insupportable à une grande partie du public.

4 minutes, 33 secondes volées à leur précieuse vie.
Est-ce que ce n’était pas un cadeau, en fait, plutôt qu’un vol ?
Donner envie de pratiquer une forme d’immobilité,
D’attendre en silence que ce qui passe, passe,
Que ce qui arrive, arrive.
Une forme de méditation collective ?

Mais si vous changiez d’élément (#PubHerta)
Si vous trouviez un petit coin de nature (#LeChatMachinesansphosphate)
Ces 4’33“ pourraient bien s’étendre, doubler, tripler la mise.
Vous pourriez même y prendre goût…

4’33“ passées en silence (de votre part),
Ça s’tente, non ?

Je vous invite à vous aventurer dans le même genre d’expériences.

Si vous voulez aller plus loin, ou peut-être puiser des idées,
Il y a quelques vidéos sur ma chaîne YouTube.
Elles font dans les 5-7 minutes, des fois un peu moins, parfois ça dépasse.
Pour continuer sur le même sujet :
Sur l’éloge d’écouter plutôt que d’entendre,
De regarder plutôt que de voir, aussi.

Une fois que vous aurez laissé leurs chances aux  4’33“ de silence.

Il sera temps de les remplir,
Avec ce que vous aurez décidé de créer avec.

Ça promet d’être sublime.

Merci de m’avoir lu,
À vos partitions !
Et à vendredi.

Nicolas